Par Céline Moreau et Alexandre Govaerts (FGTB)
La redistribution des richesses entre le Travail et le Capital passe par deux canaux principaux : l’augmentation des salaires (directs et indirects) et la réduction collective du temps de travail. Pendant qu’on essaye de déboucher le premier, il est bon de garder l’habitude d’emprunter également le second.
Pour « restaurer la compétitivité » des entreprises, les salaires en vigueur en Belgique sont soumis depuis plusieurs années à ce que l’on appelle ici un « gel salarial ». En quelques mots : si l’indexation automatique des salaires (lien des salaires à l’inflation) survit tant bien que mal et les augmentations barémiques sont toujours possibles, la négociation d’augmentations salariales brutes au niveau national, sectoriel et d’entreprise est corsetée jusqu’à en devenir ridicule. Ainsi, le 0 (zéro) % négociable en 2015 est passé à 0,5% en 2016, puis à 1,1% sur deux ans pour 2017 et 2018.
Tout en continuant à agir pour relancer la distribution des richesses de ce côté-là, de nombreuses organisations militantes pensent, négocient et appliquent un autre mécanisme de redistribution de la valeur produite : la réduction collective du temps de travail.
Et elles doivent se battre pour l’obtenir : les réactions patronales sont presque toujours stéréotypées (« comment assurer la production ? », « et notre compétitivité ? », « vous n’arriverez qu’à augmenter la charge de travail », etc.) et les négociations ardues. Il est fortement conseillé aux militant.e.s de la RCTT d’ajouter à leur extrême motivation une bonne dose de patience…
Mais, parfois, on peut compter sur une victoire rapide.
Il en est ainsi depuis quelques jours dans l’usine chimique Oleon (Flandre-Orientale). Face à une charge de travail en augmentation et à l’immobilisme des employeu.r.se.s, les salarié·e·s ont décidé de partir en grève à la mi-septembre. Après 3 jours d’arrêt de la production, la direction a accédé aux demandes des travailleur·euse·s. Parmi celles-ci, une réduction collective du temps de travail, avec maintien du salaire et embauche compensatoire pour éviter que les cadences s’affolent.
Ce n’est qu’une petite goutte d’eau dans l’océan de la dérégulation du marché du travail et de la « flexibilisation » des horaires...
Mais elle prouve qu’il est possible qu’un collectif de salarié·e·s déterminé.e.s relance l’évolution civilisatrice vers une diminution générale du temps de travail. Et cela constituera une belle motivation pour les militant.e.s d’autres pays européens qui luttent dans ce sens